Notre road trip pour visiter le Magne une semaine, le secret le mieux gardé du Péloponnèse
Vous n'avez encore jamais visité le Magne, voire vous ne le connaissez pas du tout ? N’en ayez pas honte, rare sont ceux qui savent placer sur une carte cette région, très largement préservée du tourisme de masse, du sud du Péloponnèse en Grèce. C'est le moment de préparer un road trip dans le Magne et de réparer cette erreur.
Il faut dire que le Magne (en grec Μάνη, en anglais Mani) ne ressemble pas vraiment aux cartes postales des idylliques îles des Cyclades. Pas de petites maisons blanches aux coupoles bleues surplombant une mer d’un bleu profond comme à Santorin, pas d’hôtels de luxe ou de clubs où danser toute la nuit comme à Mykonos mais des villages de pierre aux allures de forteresses, des paysages arides et sauvages, des troupeaux en liberté, d’authentiques tavernes à l’ancienne et des routes au milieu de rien.
Qu’un orage s’abatte sur la région — ou que la brume se lève — et le décor évoquera alors davantage l’Écosse ou l’Irlande que les habituels paysages méditerranéens, que l’on retrouve dans d’autres régions du Péloponnèse. Pour vous permettre de découvrir cette région méconnue et profondément sous-estimée, on partage avec vous notre itinéraire idéal en 6 étapes.
Ce qu’il faut savoir avant un road trip dans le Magne
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Le sujet ne s’appelle pas « road trip » pour rien. Le Magne se parcourt en voiture, sinon rien. Si vous aimez conduire sur des routes sinueuses, offrant des points de vue à couper le souffle, sans être embêté par le trafic, le Magne est définitivement fait pour vous !
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La région est compacte (une cinquantaine de kilomètres du nord au sud pour une largeur évoluant entre 8 et 12 kilomètres seulement). Pour autant ne prévoyez pas de tout faire / tout voir en une journée. La multitude de sites d’intérêts, les petites routes et la tentation permanente de s’arrêter pour prendre des photos nécessite de prévoir du temps sur place. Deux nuits — et deux jours pleins sur place — sont un minimum pour vraiment en profiter.
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Si visiter le Magne n’est pas la Côte d’Azur, on évitera tout de même – idéalement - les mois de juillet et août pour apprécier au mieux le côté sauvage de ce territoire aride et mystérieux.
Étape 1 | Arriver dans le Magne depuis Kalamata
S’il est évidemment possible de visiter le Magne à travers différents parcours, celui que nous vous proposons permet d’explorer la région graduellement, en se réservant les routes les plus spectaculaires pour la fin.
On suggère donc d’attaquer le road trip en arrivant depuis Kalamata (la seconde plus grande ville du Péloponnèse, pas la peine de s’y arrêter, elle ne présente que peu d’intérêt).
On peut donc commencer par mettre le cap vers Mistra, ancienne cité byzantine située non loin de la légendaire Sparte. Pour une première pause déjeuner, on s’arrête chez Chromata, une excellente adresse qui se mérite — que l’on atteint au terme de petites routes exigües. Assis sur une terrasse surplombant les plaines rocheuses, on goûte ici à une cuisine grecque moderne qui change des sempiternelles moussakas, et notamment à l’une des meilleures feta frite au miel de notre périple. Compter environ 20€ par personne, hors boissons.
La route longeant la côte occidentale de la péninsule s’enfonçant dans le Golfe de Messénie permet de profiter de jolis points de vue, entre mer et montagne. Deux stops sont recommandés en route :
- Le premier pour découvrir le village de Kardamyli, coincé entre la mer et le Mont Taygète. Dans L’Iliade, Homère mentionne Kardamyli comme l'une des sept cités offertes par Agamemnon à Achille, pour qu'il participe au combat pendant la Guerre de Troie. Aujourd’hui, Kardamyli est considéré comme l’une des plus charmantes cités côtières du coin avec ses jolies plages et son ambiance restée typique.
Après une balade dans les ruelles, on s’offre une pause déjeuner sur la terrasse du restaurant Tikla. Si le lieu paraît de prime abord un peu trop branché en comparaison des petites cantines alentours, on y goûte pourtant une cuisine excellente, d’inspiration grecque et méditerranéenne, sophistiquée mais sans aucune exagération, à l’image de ce tartare de chinchard, eau de tomates et herbes fraîches, ou de ce tataki de thon au yaourt grec et huile de persil. Le tout à des prix tout à fait raisonnables, et en prime une belle sélection de vins naturels grecs.
- Le second, quelques kilomètres plus loin, à Stoupa. Cette petite bourgade balnéaire, désormais appréciée des touristes britanniques, allemands ou néerlandais peut ne pas sembler très intéressante au premier abord. Les restaurants sans charme sont alignés le long d’une plage, somme toute assez banale.
Mais... en dépassant la plage principale, quelques centaines de mètres plus loin, on atteint l’authentique taverne Tis Marias. Chez Maria, pas de menu mais un assortiment de plats du jours, façon mezzés chauds, proposé à la modique somme de 15€ pour deux. Avec sa terrasse ombragée, son service souriant et son atmosphère typiquement grecque, c’est le spot idéal pour déjeuner sur le chemin.
Étape 2 | Limeni et Areópoli, portes d’entrée du Magne
À trois quarts d’heure de voiture de Stoupa, et après avoir vu le paysage évoluer graduellement (une végétation de moins en moins présente, des paysages de plus en plus désolés), on atteint finalement Areópoli, la deuxième plus grande localité de la péninsule du Magne après Gythio, avec à peine plus d’un millier d’habitants !
Areópoli mérite que l’on s’y attarde pour de nombreuses raisons :
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Son centre historique est tout à fait charmant, à l’exception d’une place moderne ratée. On y trouve de nombreuses tavernes authentiquement grecques, de nombreuses églises et chapelles et même quelques bars aux intérieurs design !
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Ses environs, aussi bien la campagne alentour que le micro-port de Limeni — où l'on recommande de ne pas se baigner en raison des tortues à quelques kilomètres de là, méritent eux-aussi le détour. La taverne de poissons Takis, posée au bord de l’eau à Limeni, a la réputation d’être l’une des meilleures tables des environs.
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C’est également à Areópoli que l’on trouve l’une des plus belles hôtelleries du Magne, à mi-chemin entre l’hôtel et le bed & breakfast, l’Antares Hotel Mani (à découvrir dans cet article dédié).
Étape 3 | D’Areópoli à Gerolimenas
C’est en reprenant la route d’Areópoli, direction plein sud, que l’on va réellement visiter le Magne, territoire aride hérissé de tours fortifiées aussi austères que mystérieuses. Ces tours, véritables symboles de la région, représentent l’héritage d’une époque (le XVIème siècle) où les Maniotes, avaient besoin de se protéger des envahisseurs extérieurs, et notamment des Turcs dont ils avaient la fâcheuse habitude de pirater les bateaux !
Sur la première partie du trajet vers Gerolimenas, on n’hésitera pas à quitter la route principale pour rejoindre le réseau secondaire. L’occasion de s’enfoncer dans la campagne maniote sauvage mais également de découvrir ses villages les plus typiques comme Fragkoulias ou Drialos et ses deux superbes églises, collées l’une à l’autre.
Un peu plus au sud la route offre de belles vues sur la baie de Mezapos et le Cap Tigani, en forme de poêle à frire. Quelques kilomètres plus bas et on file vers Stavri, non sans avoir jeté un œil à Kita, l’un des villages les plus pittoresques de la région.
Après avoir dépassé Stavri, on pourra rejoindre le minuscule village d’Agia Kiriaki (20 habitants seulement !) qui offre également un panorama sur la baie de Mezapos. Les amateurs de randonnée ne manqueront pas, quant à eux, la marche vers l’église antique de Panagia Agitria (accessible uniquement à pied) où vit toujours, reclus, un moine.
De retour vers le sud, suivez votre instinct sur les routes minuscules et désertées de ce coin du Magne aux paysages si caractéristiques. Pour peu que le ciel soit gris (ce qui arrive plus souvent qu’on ne l’imagine) on se croirait dans un décor de Game of Thrones !
Étape 4 | La côte sud de Gerolimenas au Cap Ténare
On atteint Gerolimenas, dont le nom signifie simplement le « vieux port ». Jusque dans les années 1970, cette bourgade de pêcheurs ne pouvait être atteinte qu’en bateau ! Aujourd’hui le tourisme fait vivre le village (qui ne compte qu’une cinquantaine d’habitants…) grâce à quelques boutique-hôtels et auberges de charmes et restaurants sur le port. L’endroit a tout de même réussi à sauvegarder une bonne partie de son authenticité.
Pour une escale d’une ou plusieurs nuits dans cette région parmi les plus reculées de notre itinéraire dans le Magne, on ne saurait que trop recommander de poser ses valises à l’Hôtel Kyrimai. Situé en plein cœur du village de Gerolimenas, cette ancienne bâtisse construite en 1870 a été transformée en un boutique-hôtel au charme gréco-vintage, avec des chambres aux allures de cabines de bateaux, et surtout une situation en bord de mer qui offre une vue imprenable sur l’horizon. Sans oublier un excellent restaurant et sa terrasse les pieds dans l’eau.
Après cette pause, on reprend la route vers Vathia, indéniablement l’un des highlights de ce road trip. Ce village qui domine fièrement la côte sud du Magne est fameux pour sa concentration de tours fortifiées, probablement la plus élevée de toute la région. Ce n’est pas pour rien que certains surnomment Vathia le « Manhattan du Magne » ! Pour autant, ne vous attendez pas à voir pulluler les cars de touristes et les boutiques de souvenirs, Vathia est aujourd’hui, et plus que jamais, un village déserté de sa population.
Bonne nouvelle : la route autour de Vathia offre de spectaculaires points de vue sur la côte sud du Magne et ses plages au calme olympien. Un ruban de bitume parfaitement intégré dans le paysage et le plus souvent désert qui nous emmène naturellement vers l’extrémité-sud du Magne, dans la région de Marmari, Porto Kagio et Kokkinogia. C’est ici que l’on trouve certains des plus beaux paysages du Magne. C’est également ici que l’on pourra visiter les vestiges du Temple de Poseïdon et d’Apollon ou se baigner dans les eaux du Cap Ténare, le point le plus méridional de la Grèce continentale et du continent européen !
Les amateurs de mythologie grecque noteront que le Cap était considéré par les Anciens comme l’une des entrées du royaume des morts, les Enfers, où régnaient le dieu Hadès et sa femme, Perséphone.
Étape 5 | La côte orientale, de Lagia à Kotronas en passant par Kokkala
En remontant de Kokkinogia, on pourra faire un rapide stop à Porto Kagio, minuscule port où mouillent quelques voiliers en saison. Puis on filera au nord vers Lagia, village reculé et ô combien pittoresque de la côte orientale du Magne.
Pour parvenir à Lagia, les plus intrépides pourront emprunter le chemin (non goudronné, départ un kilomètre après Vathia environ) passant par Kenourgia Chora, un hameau perché sur les hauteurs de Vathia. Les troupeaux de cochon en liberté, traversant tranquillement la route, y sont légions.
Puis on remontera tranquillement la route en direction de Kotronas en profitant de la beauté prodigieuse des paysages depuis la route, probablement l’une des plus belles de la Méditerranée. Et c’est en fins connaisseurs des routes corses et italiennes que nous parlons !
Sur le trajet, plusieurs lieux méritent que l’on s’y intéresse:
- La plage aux eaux cristallines de Marathos, à deux pas de Kokkala, un village qui ne présente quant à lui que peu d’intérêt ;
- Le hameau d’Alipa. Le légendaire réalisateur américain John Cassavetes y aurait tourné des scènes d’un film dans les années 70. On peut y manger dans une taverne intimiste (cinq tables seulement), les pieds dans l’eau ;
- Le pittoresque village de Flomochori, comparé par certains à San Gimignano !
- La plage de Chalikia Vatta ;
- Le joli port de Kotronas ;
Étape 6 | Au revoir le Magne…
De Kotronas à Gythio, on est certes encore dans le Magne. Bien sûr il y a toujours quelques très belles portions de route, quelques plages réputées, comme à Skoutari mais la végétation méditerranéenne reprend peu à peu ses droits, les tours disparaissent petit à petit, les animaux en liberté ne sont plus là… Le retour à une certaine forme de normalité méditerranéenne en quelque sorte.
On regrette déjà ce que l’on vient de quitter. Mais une chose est certaine : nous reviendrons dans ce Magne aussi séduisant qu’étonnant. Probablement la plus belle découverte de l’année pour la rédaction de YONDER.