La Ferme du Pré de Frédéric Anton, l’auberge chic qu’on attendait
Décidément, les planètes sont vraiment alignées pour Frédéric Anton cette année. Alors qu'il vient d'être sacré « Cuisinier de l'année » par le Guide Gault&Millau, voilà que ce MOF aux 5 toques et aux trois étoiles, débute une nouvelle aventure gourmande et charmante dans son fief du Bois de Boulogne (Paris 16). Déjà à la tête du Pré Catelan depuis plus de vingt-cinq ans (mais aussi du restaurant sur la Tour Eiffel Le Jules Verne et de la péniche Don Juan II), il inaugure La Ferme du Pré, un « bistrot » de campagne, installé juste en face de la maison mère. Son rêve depuis des années... Et c'est une réussite totale.
Une auberge de campagne à 10 minutes de la place de l’Étoile
Tous les Parisiens en ont rêvé, Frédéric Anton l'a fait. Quoi donc ? Nous plonger dans l'atmosphère d'une auberge de campagne tout droit sortie d'un classique du « Cinéma de Minuit » de Patrick Brion, mais bien d'aujourd'hui et sans nous faire quitter Paris.
Installée au cœur d’une ancienne laiterie, cette bâtisse de style normand, inexploitée depuis le début du XXe, incarne l’esprit d’une « table familiale » où se mêlent convivialité et générosité. Ici, le partage est au cœur de l’expérience, avec des plats réconfortants qui rappellent les repas de famille du dimanche. La décoration, empreinte de l’héritage du lieu, marie des éléments patinés d’antan, vaisseliers, argenterie et casseroles en cuivre, à des objets recyclés avec soin. Tomettes au sol, tadelakt et toiles de Jouy aux murs, tableaux de scènes de chasse, anciens menus retrouvés et encadrés... On sent que le chef s'est personnellement investi, chinant lui-même la plupart des assiettes et se plongeant dans les archives avec délectation.
D'ailleurs, il confie : « J’ai toujours eu envie d’ouvrir un jour un bistrot. Ce projet, je le porte depuis longtemps parce qu’il a toute sa place ici, dans ce cadre bucolique, et en écho à la table gastronomique.»
De la cuisine bourgeoise classique, mais avec des techniques de 3 étoiles
Bistrot peut-être, mais grand-bourgeois, dans ce cas. Tables nappées, argenterie lustrée, rond de serviette en place. D'ailleurs, rien qu'à la vue de cette salle charmeuse et avant même d'avoir goûté le moindre plat, on se prend à rêver d'y avoir son rond de serviette un jour...
Alors, quand « la terrine de campagne maison » et la « Crème Dubarry » arrivent, on formule de grands espoirs. Le service à la française, dans les règles de l'art, nous séduit encore un peu plus. Mais c'est indéniablement la qualité de ces entrées qui achève de nous emporter. La crème Dubarry est une démonstration d'école de cuisine, comme plus personne ne sait en faire aujourd'hui. Les petits pickles lui donnent une touche de modernité bienvenue. Si on ne se raisonnait pas, on finirait la soupière !
Ce serait dommage, tant les plats qui suivent méritent qu'on leur fasse honneur. Soit une « côte de porc ibérique à la charcutière » et des « ris de veau aux champignons ». La découpe et la présentation de la viande sont une œuvre d'art. Les ris, présentés dans un petit plat à four en cuivre, nous font grande impression. Évidemment, la purée et les frites sont à l'avenant. On soulignera aussi l'art saucier du chef Anton et de son chef exécutif Mehdi Sgard. Quant au dessert, une profiterole, c'est simple, elle nous ramène directement en enfance, quand on avait le droit de faire couler le chocolat, lors des grands repas de famille... Voilà, le chef a touché la corde sensible, mission accomplie.
Un petit bémol qui n'en est finalement pas un : le service peut paraître un poil longuet par moment, mais c'est qu'il invite subtilement les Parisiens pressés que nous sommes à prendre le temps, à se laisser charmer par la temporalité de l'auberge, aux antipodes de la cantine branchée des faubourgs. Du grand art. Résultat, c'est nous qu'il faut déloger en fin de service, tant on ne veut plus partir !
Compter environ 100 € par personne (sans les vins).
Ce qu'il faut retenir
Alors qu'en cuisine, la tendance est au réchauffé plus ou moins bien fait, Frédéric Anton pousse à fond les curseurs et donne une leçon à tous les néo-aubergistes qui ne connaissent pas leurs classiques. L'art de la simplicité n'est pas donné à tout le monde. Il faut du métier et de l'humilité. La Ferme du Pré démontre que le chef en est le maître incontesté.
La Ferme du Pré
Le Pré Catelan
Bois de Boulogne, 75016 Paris
Ouvert du mercredi au dimanche, de 12h00-13h45 et de 19h00-20h45
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