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Emmanuel LaveranEmmanuel Laveran, Le lundi 12 février 2024
Restaurants

Poissonnerie VIOT : la poissonnerie de Paris et son comptoir restaurant qui réinvente le métier de poissonnier

Après des études de droit et d’ingénieur, Arthur et Marie-Victoire Viot décident de changer de voie. Récit d’une aventure entrepreneuriale pas comme les autres qui débouche sur l’un des meilleurs comptoirs restaurant de poissons de Paris.
  • Poissonnerie Viot
    Poissonnerie Viot
  • Poissonnerie Viot
    Poissonnerie Viot

Il y a 2 ans, Arthur et Marie-Victoire, forts de l’exemple d’un beau-frère boucher sur le marché Saint-Germain, se lancent par passion dans l’artisanat. Une nouvelle carrière qui débute par une remise en cause en profondeur du métier de poissonnier.

La genèse 

Avant de racheter l’échoppe devenue « Poissonnerie Viot », Arthur était en stage chez Allianz et bouclait son master en droit des assurances. Marie-Victoire débutait une carrière d’ingénieur chez EDF, vite interrompue par l’envie de se mettre à son compte. « Si je fais un métier je ferai poissonnier » se répétait Arthur, peu enthousiaste à l’idée d’intégrer un grand groupe d’assurances. Et puis le beau-frère reprend une boucherie au marché Saint Germain et commence à commercialiser avec succès des viandes de qualité. L’exemple et la magie du travail des produits vivants opère. « On est tombés amoureux de ce lieu », en plein 6èmearrondissement de Paris, « cela nous faisait rêver de devenir artisans » nous livre Arthur. D’abord, il s’oriente vers un CAP en candidat libre et passe quelques mois chez le premier poissonnier du marché, puis dans le restaurant parisien d’Yves Camdeborde, à la préparation des poissons et crustacés. On imagine la tête des parents dont la progéniture, après des études supérieures et un avenir tout tracé, s’interroge sur les us et coutumes du métier de poissonnier ou encore le traitement et la conservation des poissons.

    • Poissonnerie Viot © Emmanuel Laveran
    • Poissonnerie Viot © Emmanuel Laveran

     

    Jamais sans la science 

    « On a d’abord mené une étude avec un scientifique, Bruno Goussault » déclare Arthur. L’idée était de comprendre le développement des bactéries, une fois les poissons pêchés, et de travailler à une meilleure conservation. Plusieurs points favorisent la détérioration des chairs. D’abord, les viscères des animaux. Garde-t-on une carcasse de vache entière plusieurs jours en chambre froide à la boucherie ? Non ! La première chose qu’on fait après l’abattage, c’est de vider les bêtes. Et pourtant, sur la majorité des étals des poissonniers, les prises sont conservées entières, dans la glace, pendant plusieurs jours…

    • Affinage du poisson
      Affinage du poisson

     

    Un autre facteur de pourrissement réside dans l’humidité. Le mucus présent naturellement sur les poissons, la glace qui se transforme en eau, apparaissent vite contraires à une longue – et bonne – conservation. À la Poissonnerie Viot, les poissons seront donc vidés et nettoyés dès leur livraison, tous les matins de (très) bonne heure.

    Une poissonnerie sans glace

    L’idée vient vite aussi d’ouvrir une poissonnerie sans glace. Préserver les poissons au sec, oui, mais avec une maîtrise parfaite des températures et de l’humidité : « présenter des poissons qui n’ont plus leurs viscères ni leurs écailles et qui ne sont pas dans la glace », la seule solution, c’est la vitrine parfaite, conçue sur mesure. Les Viot cherchent … et trouvent un fabricant spécialisé, à la Rochelle. Sachant qu’un poisson congèle à -3 degrés et que les bactéries se développent à partir de +2 degrés, ils mettent conjointement au point des vitrines spécifiques qui maintiennent l’intérieur des produits à zéro degré. Des modèles qui gèrent à la fois une température et un taux d’humidité précis sont brevetés. À la poissonnerie Viot, plus de prises entières nageant dans la glace, mais des poissons tout nettoyés à l’œil vif, aux traits frais, disposés comme des œuvres d’art prêtes à emporter. « Avec ces techniques de conservation, au bout d’une semaine, nous sommes à moins de 10 % du seuil de tolérance de développement des bactéries impropres à la consommation ». En comparaison, dans la grande distribution, ce seuil est souvent dépassé au bout de 3 jours et plus de 40 % de la pêche se retrouve jetée à la poubelle...

    • Poissonnerie Viot © Emmanuel Laveran
    • Poissonnerie Viot - découpe d'un bar

     

    Approvisionnement et ouverture de la poissonnerie Viot

    Bien sûr, une maîtrise de l’approvisionnement est clé afin de ne proposer que des poissons d’excellence. La petite pêche, moins traumatisante que les gros chaluts, garantit une chair de meilleure qualité. La méthode d’abattage ikéjimé, permet aussi de limiter le stress lié à la mort de l’animal. Des mareyeurs sont sélectionnés sur quelques belles criées : Saint-Jean-de-Luz, Vendée, Bretagne... Pendant la crise de la Covid, un stand de coquillages ferme ses portes sur le marché Saint-Germain. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, le projet de la poissonnerie Viot se concrétise. Aujourd’hui, de superbes armoires d’affinage en verre et de longues vitrines présentent de véritables joyaux des mers, à des tarifs pas si élevés, si l’on considère à leur juste mesure les pertes de poids liées à l’éviscération, la maturation (le froid sec fait s’évaporer l’eau dont la majorité des poissons est constituée) et la qualité des produits (un poisson de petit bateau coûtera deux à trois fois plus cher à l’achat que son cousin issu de la pêche industrielle).

    • Poissonnerie Viot © Emmanuel Laveran
      Poissonnerie Viot © Emmanuel Laveran

     

    Restauration

    Naît alors le désir de proposer un comptoir pour déguster sur place les fruits de la passion du couple. Quelques tables élégantes sont installées le long des vitrines dans le marché, un espace d’une quinzaine de couverts est organisé dans la boutique, et Marie-Victoire se lance dans la confection des tarama ou soupes de poissons maison. Une petite cuisine est équipée d’un four de cuisson professionnel, d’un espace de découpe, et le tour est joué. Les huîtres « Etoile Carnac » sont vendues 17 € les 6, les succulents sashimis de truite affinée ou de sériole sont tarifés 15 ou 25 € la portion. La chair des poissons crus s’avère tendre, souple, le goût est net et subtil, la réussite indéniable.

    Le tarama maison (12 €) s’avère tout simplement meilleur que tous ceux dégustés jusque-là. Pour peu qu’on soit un minimum gourmet, on ressent vraiment un « avant » et un « après » passage à la poissonnerie Viot. La soupe de poissons maison y est divine. La chair d’araignée de mer décortiquée d’une finesse et d’une fraîcheur insoupçonnée. Enfin, les poissons entiers rôtis sur place, assaisonnés d’un filet d’huile d’olive et d’une sauce soja premium, dans leur plus évidente simplicité, réveilleront tous les palais. À la dégustation, alors que l’on savoure une forme d’inédite perfection marine, le verdict tombe avec l’évidence d’un sourire : chez Viot, la vie est belle !

    • Les somptueux sashimis de la poissonnerie Viot © Emmanuel Laveran
    • Araignée décortiquée

     

      Pratique

      Poissonnerie Viot

      6 Rue Lobineau, 75006 Paris

      • Du mardi au vendredi : 08h - 13h / 16h - 20h
      • Samedi : 08h - 20h
      • Dimanche : 08h - 13h

      poissonnerie-viot.com