Tawlet, quand le festin levantin devient parisien
Note : 8/10 | Le contexte : déjeuner le mardi 15 février, trois convives.
Le pitch | Kamal Mouzawak, serial restaurateur libanais, ouvre une première adresse en France
Fin gastronome et visionnaire, Kamal Mouzawak est bien connu des amateurs pour avoir révolutionné la scène culinaire beyrouthine. Dans un Liban déchiré par des années de guerre civile (1975-1990), il aura eu l’idée brillante de remettre au centre un patrimoine culinaire menacé de disparition. Un trésor immatériel transmis par des femmes issues des quatre coins du pays, qui se succèdent chaque semaine dans les cuisines de Tawlet, sa première adresse ouverte en 2009 dans le quartier de Mar Mikhael à Beyrouth.
Dès le départ, le désir d’ouvrir une adresse parisienne avait germé dans son esprit. Il aura fallu plus d’une décennie pour le voir se concrétiser, mais le succès rencontré après seulement quelques semaines d’ouverture ne fait que confirmer le manque cuisant dont souffrait la capitale en matière de bonne cantine levantine.
Dans l’assiette | Une cuisine traditionnelle, saisonnière, régionale
Exit les sempiternels mezzés congelés, ici tout est concocté sur place dans les cuisines du sous-sol, avec des plats venant garnir un buffet se remplissant tout au long du service tel le tonneau des Danaïdes. Tout commence par un bol de soupe servi à table, chaque jour différente — ce midi-là, une roborative soupe de légumineuses — suivi d’une première tournée d’entrées : taboulé croquant, loubieh bi’zeit (haricots à l’huile), houmous, mouttabal et autres ravissants petits chaussons aux épinards. En guise de second round, une volée de plats chauds, à commencer par une mujadara safra, purée de lentilles corail injustement considérée comme le plat du pauvre, puis une délicieuse kebbeh arnabiyyeh à la sauce tahiné et riz aux vermicelles. En dessert, on se laisse tenter par une traditionnelle knafeh aux cheveux d’ange, crémeuse et fondante à souhait.
Dans la salle | Une sobriété chaleureuse
Mi-restaurant, mi-épicerie, le lieu cultive une sobriété côté décor, à mille lieues de ce à quoi nous avaient habitué les snacks libanais parisiens : sols et murs en béton, luminaires chinés, étagères en métal, tables et chaises en bois… Au total, une cinquantaine de couverts disséminés sur deux niveaux, avec un rez-de-chaussée où l’on trouve une grande table centrale, le comptoir où venir se (res)servir à loisir, et toute une armada de délicats produits libanais à emporter (zaatar, pickles, mélasse de grenade, arak, etc.). À l’étage, un jeu de touche-touche entre convives et tablées, allers et venues vers le buffet obligent, qui créent cependant une atmosphère à la fois simple et chaleureuse — et un niveau sonore au diapason.
Les plats à goûter ?
Parmi les plats régionaux que l’on trouve rarement ailleurs qu’au Liban, la mouloukhieyeh, un ragoût épais et aromatique de poulet, d’oignons, de graines de coriandre verte moulues et ail confit, servi avec du riz blanc, mais aussi les manouchés servies lors du brunch le weekend, avec la pâte de chez Sonny’s (le pizzaïolo d’en face) et le délicieux zaatar de l’épicerie, enfin les warak einab, feuilles de vignes proposées en versions végétariennes ou carnées.
Les prix ?
- Formule buffet au déjeuner : 29€
- Formule déjeuner plat du jour : 14€
- Formule buffet au déjeuner : 39€
- Formule brunch week-end (knafeh comprise) : 42€
Bon à savoir ?
- Grâce à la formule buffet, on vient ici picorer à loisir ce que la gastronomie libanaise familiale à de plus exquis à offrir.
- Côté liquides, au-delà du traditionnel arak et de la classique bière beyrouthine, une carte des vins qui propose des cuvées de vignerons indépendants libanais, dans un esprit « nature » qui commence à faire parler de lui sur la scène viticole locale et internationale.
- Pour les appétits et budgets plus modestes, le lieu propose chaque un plat du jour unique à 14€, accompagné d’une salade.
Notre avis en un clin d’œil
Ceux qui ont eu la chance de passer un peu de temps au Liban sont unanimes : il manquait cruellement à Paris une adresse où retrouver tous les plats traditionnels libanais dans leur version la plus authentique. C’est désormais chose faite !
Note de la rédaction : 8/10*
* La note reflète l'intégralité de l'expérience (assiette, cadre, atmosphère, service, rapport qualité-prix...) et est relative au positionnement de l'établissement (un excellent bistrot peut se voir attribuer la note de 10/10). Les tables recueillant des notes égales ou inférieures à 5/10 ne font pas l'objet de chroniques.