Les 50 meilleurs restaurants de Paris #17 : Restaurant Akrame (chef Akrame Benallal)
L’heure de la rentrée a sonné et avec elle celle du retour de notre grande saga éditoriale sur les 50 meilleurs restaurants de Paris et les 50 chefs qui font la scène gastronomique de la capitale. Et nous ne pouvons pas mieux débuter cette nouvelle année qu’en nous rendant dans le nouveau restaurant d’Akrame Benallal, l’un des meilleurs représentants de la nouvelle haute cuisine française.
Le pitch : le nouveau chez-lui d’Akrame
Depuis près de six ans désormais, Akrame Benallal est considéré comme l’un des meilleurs espoirs d’une nouvelle scène gastronomique française, respectueuse des codes du genre et pourtant résolument tournée vers l’avenir. Le succès a été fulgurant pour cet ancien disciple de Pierre Gagnaire, passé par les cuisines de Ferran Adrià en Espagne et admirateur affirmé d’Alain Ducasse ou Jean-Georges Vongerichten, deux chefs trois-étoiles aux qualités entrepreneuriales incontestables. Après avoir obtenu deux étoiles dans son « gastro » de la rue Lauriston, où il a constitué le port d’attache de son empire naissant de la restauration (avec la cave Brut et son premier Atelier Vivanda, bistrot carnivore au potentiel gigantesque), on retrouve Akrame Benallal du côté de la rue Tronchet, à deux pas de la Madeleine. C’est ici, au fond d’une cour chic et aménagée avec goût, dans ce qui ne devait être originellement qu’une adresse pop up ,qu’il a finalement décidé de poser ses valises. On le comprend volontiers tant le lieu a de l’élégance à revendre.
Pour autant, pas question pour le patron des lieux de tout changer. Même atmosphère intimiste et même volonté de faire de ce restaurant sa maison de « haute-couture » comme il se plaît à l’expliquer. S’il multiplie les ouvertures et les concepts, à Paris et à l’autre du monde (Hong Kong, Baku ou Manille), il voit son nouveau restaurant au cœur de Paris comme le cœur du réacteur de son groupe, le bien nommé Akrame Power. C’est ici qu’il crée autant qu’il reçoit ses hôtes en aubergiste des temps modernes. Et c’est ici, dans ce laboratoire créatif et atelier culinaire avant-gardiste, que nous allons tâcher de déterminer s’il parvient à atteindre l’objectif ambitieux inscrit sur les menus du jour : « Tenter de rendre l’éphémère inoubliable ».
Découvrez notre interview d'Akrame Benallal pour en savoir plus sur son parcours, ses inspirations et sa vision.
Dans l’assiette
Décrié par certains chefs qui y voient la négation du plaisir du client, le menu carte blanche a encore les honneurs d'Akrame, qui réaffirmae ainsi sa volonté de maîtriser de bout en bout l’expérience gastronomique qu’il délivre. Ne cherchez pas la carte, elle n’existe pas. Trois variantes de menus (3, 4 et 6 plats, sans compter les hors d’œuvres et autres amuse-bouches) sont proposés aux convives. Les intolérances alimentaires et allergies font également l’objet d’un contrôle préalable, en même temps que le choix de la viande constituant le second plat principal et point d’orgue du déjeuner. En ce lundi hivernal, pigeon, ris de veau et côte de veau s’offrent ainsi à nous. Passée la phase de commande, réduite donc à sa plus simple expression, le show culinaire imaginé par Akrame Benallal peut commencer. Et le moins que l’on puisse dire est que ça démarre sur les chapeaux de roue avec un velouté de topinambour, haddock fumé et cacahuètes ! Une entrée en matière réconfortante et déroutante, portée par un mariage de saveurs aussi inattendu qu’harmonieux. Derrière la volonté évidente d’étonner, ce que le format du menu façon omakase impose, Akrame parvient avec grâce à ne pas tomber dans le piège d’une cuisine gimmick, qui ne fonctionnerait que par effets de manches et autres fulgurances éphémères. Bien au contraire, plus le menu avance et plus les assiettes se montrent redoutablement séduisantes.
La scénographie et l’esthétisme (impossible de ne pas être impressionné par le sens du détail de chaque séquence) sont au service d’assiettes inventives, percutantes, singulières, sachant expérimenter (la mimolette et le cressons viennent ici accompagner un bar de ligne délicat) ou magnifier le produit sans jamais le dénaturer. Et c’est certainement la très grande force de la cuisine d’Akrame Benallal. En mettant au centre de ses créations les plus beaux ingrédients, il s’inscrit dans la filiation de l’un de ses modèles, Alain Ducasse. En y injectant ses propres idées et sa vision créative, fourmillante d’idées et débordante d’énergie, il signe une cuisine identitaire enthousiasmante, offrant plusieurs niveaux de lecture, du raffinement insensé d’une raviole de betterave, Saint-Jacques et citron jusqu’au plaisir immédiat d’une côte de veau parfaitement cuite à déguster dans son jus. Quant au déjà célèbre homard, cuit à la minute dans son bocal, il est le meilleur symbole de cette cuisine qui émerveille autant qu'elle ne régale.
Dans la salle
C’est un peu désorienté que l’on découvre le nouvel antre d’Akrame rue Tronchet. En poussant la porte d’entrée, on tombe nez à nez avec un imposant baby-foot coloré. Pas vraiment l’idée que l’on se fait d’un restaurant gastronomique à Paris. Puis un découvre une seconde salle, façon antichambre de la cuisine. La lumière est tamisée, le décor impeccablement stylisé. Au milieu trône une majestueuse table d’hôtes en bois, matière vivante et chaleureuse que l’on retrouvera par petites touches tout au long de notre déjeuner. Enfin la salle à manger proprement dite. Lumineuse (elle s’ouvre sur la belle cour intérieur jouxtant l’Hôtel de Pourtalès) et contemporaine, elle se distingue autant par ses œuvres d’art (prêtées par la galerie Perrotin, ne manquez pas l’incroyable sculpture L'homme qui tombe de haut de Daniel Arsham au plafond) que par sa sobriété. Exit le décorum traditionnel des restaurants multi-étoilés et les nappes blanches. Ici les tables sont nues, mettent en scène des couverts dressés à l’oblique ou un imposant couteau qui ne nous quittera pas durant tout le repas. Pas de doutes, l’adéquation avec l’assiette est parfaite.
Le service
Au-delà de l’assiette et du décor, l’équipe en salle, dynamique et aux costumes parfaitement ajustés, vient compléter le triptyque imaginé par Akrame Benallal pour composer son restaurant gastronomique idéal. Après un moment pour trouver ses marques, le ballet du service, sommelier inclus, parvient à trouver le juste équilibre entre distance et proximité, entre professionnalisme, évidemment de rigueur, et décontraction en phase avec les attentes actuelles des convives. L’exercice n’étant jamais aisé, il convient naturellement de saluer le travail réalisé en la matière.
L’addition
Minimum syndical à 60€ (pour une introduction en trois plats à l’heure du déjeuner). Il faudra compter 115 et 145€ pour une plongée plus approfondie dans l’univers culinaire d’Akrame. Ajoutez de 70 à 80€ pour le pairing alcoolisé associé (qui contient lui-même son lot de surprises, on ne vous en dit pas plus).
Le mot de la fin
Avec son nouveau restaurant dans le quartier de la Madeline, Akrame semble vouloir prouver au monde entier que malgré la multiplication de ses projets et la croissance vertigineuse de son groupe, il n’en reste pas moins pleinement investi en tant que chef de cuisine. Dans son restaurant flagship, le seul à porter son nom, Akrame Benallal souhaite rendre « l’éphémère inoubliable » grâce à une cuisine identitaire et créative. Le pari était ambitieux. Il est gagné haut la main tant il a su imaginer un ensemble harmonieux, prenant constamment des risques sans jamais tomber dans le piège des excès. L’innovation et l’avant-gardisme sont ici au service du bon et du plaisir. Et c’est bien là l’essentiel.
PRATIQUE
Restaurant Akrame
7 rue Tronchet - Paris 8ème
(Nouvelle adresse)
Menu Amis du Midi (3 plats, servi uniquement au déjeuner) : 60€
Menu Coup de cœur (4 plats) : 115€
Menu Gourmand (6 plats) : 145€
Ouvert du lundi au vendredi au déjeuner et au dîner.
Tél. : +33 (0)1 40 67 11 16
Informations et réservations sur le site Web Restaurant Akrame.